J.P. Morgan et Morgan Stanley : quelles différences ?
En finance, le nom « Morgan » est un symbole. Il renvoie à deux des plus grandes banques d’affaires au monde : J.P. Morgan et Morgan Stanley. Convoitées, enviées, admirées par plusieurs générations d’aspirants banquiers, ces deux mastodontes se sont érigés avec le temps comme des piliers de la finance mondiale. Connues de tous, mais réellement comprises par combien ?
Dans cet article, nous allons d’abord revenir sur l’histoire commune des deux banques avant de donner quelques arguments pour rejoindre l’une des deux.
J.P. Morgan et Morgan Stanley : Deux banques aux origines communes
Les histoires de J.P. Morgan et Morgan Stanley sont intimement liées.
La création de J.P. Morgan (1871)
Les origines de J.P. Morgan sont étroitement liées à son fondateur : John Pierpont Morgan. Fils du financier Junius Spencer Morgan et de Juliet Pierpont, John Pierpont Morgan fait ses études en Europe, d’abord dans un pensionnat en Suisse puis à l’université de Göttingen en Allemagne. A son retour aux Etats-Unis, le jeune Morgan débute sa carrière dans la banque. Après un passage controversé chez Duncan, Sherman & Company (il a utilisé l’argent de la banque pour s’enrichir personnellement en spéculant sur le commerce de grains de café…), il est « recruté » par son père pour diriger l’une de ses filiales. John Pierpont révèle rapidement son talent pour les affaires mais aussi son absence de scrupules. Par exemple, pendant la guerre de Sécession, il achète des fusils obsolètes, les remet en état et les revend à l’armée beaucoup plus cher. Cependant, ces armes étaient défectueuses et le gouvernement refusera de payer Morgan !
En 1871, il forme avec Anthony Drexel la Drexel, Morgan & Company, qui succède à la banque J.S. Morgan & Co. (fondée par Junius Spencer Morgan, son père) et se distingue rapidement par sa modernité pour l’époque. Dès 1895, elle changera de nom pour s’appeler J.P. Morgan & Co.
La croissance fulgurance de J.P. Morgan (1871-1935)
Entre 60 ans, la petite banque new-yorkaise devient à la fois un acteur influent aux Etats-Unis et une institution financière de premier plan au niveau mondial.
D’abord, J.P. Morgan s’impose rapidement comme l’une des banques d’investissement les plus importantes aux Etats-Unis et y joue un rôle clé dans le financement des grands projets industriels, en particulier dans les domaines des chemins de fer, de l’acier et de l’électricité.
Ensuite, J.P. Morgan accompagne la consolidation de nombreuses industries américaines. Par exemple, la banque orchestre la fusion de plusieurs entreprises sidérurgiques pour créer l’U.S. Steel, l’une des plus grandes entreprises du secteur à l’époque. Conjointement avec la Standard Oil des Rockefeller, la banque crée aussi la Northern Securities Company (qui réunit la Northern Pacific Railroad et la Great Northern Railways, deux entreprises qui reliaient l’Atlantique au Pacifique). De fait, Morgan contrôlait avant 1914 environ un tiers du réseau ferré américain !
Enfin, J.P. Morgan est intervenue de manière significative lors de crises financières majeures, par exemple lors de la panique de 1907 au cours de laquelle la banque organise des opérations de sauvetage pour stabiliser le système financier américain.
Pendant cette période, J.P. Morgan a aussi mené avec succès à la fois une diversification de ses activités (conseil financier, gestion de fortune, financement) et élargi sa présence à l’international. La banque a joué un rôle important dans le développement industriel des États-Unis et a contribué à façonner l’économie américaine de l’époque au travers de ses différentes activités.
Morgan Stanley, un « spin-off » de J.P. Morgan (1935)
La création de Morgan Stanley en 1935 suit l’évolution de la réglementation financière aux Etats-Unis. Concrètement, le gouvernement américain adopte en 1933 le Banking Act, plus largement connu sous le nom de loi Glass-Steagall. Cette évolution législative est une réponse directe à la Grande Dépression et aux problèmes financiers qui l’ont précédée (quand beaucoup de petits épargnants ont perdu leurs économies suite à l’effondrement du système financier en 1929…).
Précisément, la loi Glass-Steagall introduit une séparation stricte entre les activités de banque de détail (c’est la banque commerciale, celle pour les particuliers avec les dépôts et les prêts) et les activités de banque d’investissement (c’est a banque d’affaires pour la grande clientèle). Par conséquent, les banques commerciales ont été contraintes de se séparer de leurs activités de banque d’investissement. En réponse à la loi Glass-Steagall, J.P. Morgan doit donc se diviser en deux entités distinctes dès 1935 :
- Une partie devient Morgan Stanley, spécialisée sur les activités de banque d’investissement et de gestion de patrimoine
- L’autre partie devient Morgan Guaranty Trust Company, axée sur les activités de banques de détail
Pourquoi aller chez J.P. Morgan ou Morgan Stanley ?
Les deux banques ont une histoire commune. Même si leur spécialisations étaient différentes en 1935, elles se ressemblent beaucoup aujourd’hui. D’ailleurs, elles attirent de nombreux étudiants chaque année. Pourquoi ?
Deux « bulge brackets » américaines
J.P. Morgan et Morgan Stanley appartiennent toutes les deux au groupe des « bulge brackets », une expression couramment utilisée dans le domaine de la banque d’affaires pour désigner les plus grandes et prestigieuses banques d’investissement du monde. Elles se distinguent d’ailleurs des traditionnelles boutiques M&A comme Lazard, Rothschild & Co ou Centerview. Leurs caractéristiques principales sont les suivantes :
Taille et envergure internationale
Les « bulge brackets » opèrent à l’échelle mondiale. Elles sont présentes dans de nombreux pays à travers le monde et sont actives sur les marchés financiers internationaux. J.P. Morgan et Morgan Stanley sont des mastodontes de la finance : la première est présente dans 60 pays (250 000 professionnels) et la seconde opère dans 40 pays (70 000 professionnels).
Diversification des services
Les « bulge brackets » offrent une gamme complète de services financiers : financement, gestion d’actifs, trading, recherche, conseil en M&A, etc. Cette diversification leur permet de servir une clientèle variée, allant des grandes entreprises aux gouvernements en passant par les investisseurs institutionnels.
Participation aux grandes transactions
Les « bulge brackets » sont fréquemment impliquées dans les opérations les plus importantes et les plus complexes, à la fois dans le financement (avec les introductions en bourse ou les émissions d’obligations) et les fusions et acquisitions de grande envergure. En France, J.P. Morgan a par exemple récemment conseillé Swile dans l’acquisition de Bimpli (services dématérialisés d’avantages aux salariés) auprès de BPCE. De plus, Morgan Stanley a accompagné Thales dans son rachat de Imperva (société américaine spécialisée dans la cybersécurité) pour 3,6Mds$ auprès du fonds de Private Equity Thoma Bravo.
Réputation et prestige
En raison de leur taille, de leur expertise et de leur histoire, les « bulge brackets » jouissent généralement d’une réputation prestigieuse dans le monde financier. Elles attirent souvent les meilleurs talents et peuvent compter sur des relations solides avec les entreprises, les investisseurs et les régulateurs.
Les autres « bulge brackets » sont par exemple Goldman Sachs, Citi, Bank of America ou encore Deutsche Bank.
Paris : le nouveau « hub » européen des banques américaines ?
Depuis plusieurs années, Paris concurrence frontalement les grandes places financières internationales, en particulier Londres et New York. Pourquoi ?
Les conséquences du Brexit
D’abord, le « Brexit » a déclenché des transferts d’activités de Londres vers d’autres capitales européennes, dont Paris évidemment. Ensuite, la vie quotidienne y est appréciée. Parmi les éléments cités par les banquiers : les brasseries, les écoles internationales, la possibilité d’habiter à proximité de leur siège au centre-ville (Paris est moins étalée que Londres ou New York). Enfin, la qualité des grandes écoles et universités françaises est unanimement reconnue. Les campus parisiens sont un vivier de recrutement riche pour les banques.
L’environnement pro-business en France
Certaines banques mettent aussi en avant le rôle d’Emmanuel Macron. Ancien banquier d’affaires chez Rothschild & Co, il sait courtiser les dirigeants de Wall Street, notamment le CEO de J.P. Morgan Jamie Dimon qui a été reçu à l’Elysée en 2021. Plus largement, le regard des banques étrangères s’est amélioré grâce à des mesures d’incitation fiscale (réduction de l’IS) ou de flexibilité (la loi Travail qui rend plus facile les embauches et licenciements).
La présence de J.P. Morgan et Morgan Stanley en France
J.P. Morgan et Morgan Stanley s’inscrivent pleinement dans cette dynamique. Suite au Brexit, Paris s’est imposé comme le premier « hub » de J.P. Morgan en Europe. Ses effectifs ont augmenté de 250 à 800 salariés, avec la moitié rapatriée de Londres (en particulier sur les activités de « marché ») et qui travaillent dans le nouvel immeuble de la banque situé près du Louvre et inauguré en 2021. De même, la France occupe une place particulière pour Morgan Stanley. En effet, c’est à Paris que la banque américaine a ouvert son premier bureau européen en 1967, avant Londres et Francfort ! Et depuis quelques années, sous la direction d’Emmanuel Goldstein (qui a succédé à René Proglio), la banque s’active pour renforcer ses activités parisiennes. En deux ans, ses effectifs ont d’ailleurs augmenté de 150 à 400 personnes, dont une partie qui travaillent dans un nouveau centre de recherche financier.
Vous souhaitez travailler en M&A dans des banques comme J.P Morgan ou Morgan Stanley ?
C’est difficile d’intégrer ces banques. La concurrence est rude. Une bonne préparation est nécessaire ! Pour vous aider, deux anciens banquiers de Lazard ont lancé Training You en 2019 pour aider les étudiants à préparer les entretiens en M&A et plus globalement en Corporate Finance. Les formations regroupent tout ce que vous devez connaitre pour réussir un process de recrutement : questions de fit, questions techniques, exercices et cas pratiques, tests d’entraînement, fiches sur les banques et les fonds d’investissement, podcasts avec des professionnels du secteur.
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